La culpabilité du parent séparé
- clairebaratte
- 28 nov.
- 3 min de lecture

Rosalie* me confiait ce matin à propos de son fils, Jules: « je ne peux pas être trop sévère avec lui. Si je me fâche, je sais qu’il n’aura personne derrière pour le consoler ou le rassurer. Je me sens toujours coupable d’être séparée de son père…Donc j’ai beaucoup de mal à donner des règles claires et à les faire respecter ».
Rosalie éprouve cette culpabilité si fréquente chez les parents séparés ou divorcés, d’avoir imposé à son enfant un mode de vie qu’il n’a pas choisi : une garde alternée chez l’un et chez l’autre, un enfant qui ne voit jamais ses deux parents en même temps, qui doit composer avec une nouvelle réalité familiale.
Rosalie est depuis peu en couple avec un nouveau compagnon, Stéphane, et ce couple rencontre des difficultés autour de la place de cet enfant dans leur foyer recomposé. Stéphane supporte mal de voir que Jules semble avoir tous les droits, obéit peu aux règles (qui elles-mêmes sont mal définies) et par la place que Rosalie lui donne, empiète même sur leur couple. Il a parfois le sentiment d’être mis de côté par rapport au duo mère-enfant, il ne comprend plus comment se situer dans ce triangle familial.
Parmi toutes les pistes que nous allons explorer ensemble, nous allons travailler sur cette culpabilité de Rosalie qui la ronge et qui l’empêche d’avancer. Cette culpabilité l’empêche notamment de donner sa juste place à son fils. Elle l'entraîne à surinvestir affectivement leur relation, à redouter d’assumer une juste autorité en tant que parent, qui pourrait, croit-elle, le fragiliser et lui faire perdre son amour.
J’ai proposé à cette mère cet extrait de la lettre ouverte à tous les parents méchants par un neuropsychologue *:
"Un jour, quand mes enfants seront assez vieux pour comprendre la logique qui motive un parent, je vais leur dire, comme mes parents méchants m’ont dit:
Je t’ai aimé assez pour te demander où tu allais, avec qui, et quand tu serais de retour à la maison…(…)
Je t’ai aimé assez pour me tenir plantée là dans le cadre de porte pendant deux heures tandis que tu nettoyais ta chambre, une affaire de 15 minutes en principe !
Je t’ai aimé assez pour te laisser voir la colère, la déception et les larmes dans mes yeux. Les enfants doivent apprendre que leurs parents ne sont pas parfaits.
Je t’ai aimé assez pour te laisser assumer la responsabilité de tes actions même lorsque les pénalités étaient si dures qu’elles ont presque brisé mon coeur.
Mais surtout,
Je t’ai aimé assez pour dire NON même quand je savais que tu me détesterais pour ça. Telles étaient les batailles les plus difficiles de toutes. Je suis heureuse de les avoir gagnées, parce qu’à la fin, tu y as gagné aussi. Et un jour, quand tes enfants seront assez vieux pour comprendre la logique qui motive des parents «méchants», tu leur diras :
Vos parents étaient-ils méchants?
Les miens l’étaient. (…) Maintenant que j'ai quitté la maison, je suis instruite et une adulte honnête. Je fais de mon mieux pour être un parent méchant comme mes parents l'étaient. Merci donc à tous les parents qui ont été assez méchants dans notre jeunesse pour nous apprendre à être de méchantes bonnes personnes."
Ce texte est à prendre au second degré, bien sûr, mais il donne à réfléchir !
Si vous êtes un parent séparé et que vous ressentez fréquemment que votre culpabilité envers vos enfants vous empêche de vous positionner justement vis-à-vis d’eux en tant que parent, sachez qu’un conseiller conjugal et familial peut vous aider à vous libérer de cette culpabilité et à ajuster votre posture éducative. Les relations familiales et conjugales peuvent s'en trouver transformées.
*les prénoms et les situations ont été modifiés pour préserver la confidentialité des entretiens garantie aux personnes que j'accueille dans le cadre professionnel.
*Stéphanie Chariot-Auchere, neuropsychologue, centre hospitalier de Lons-le-Saunier



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